Le Prix de la nouvelle Adrienne-Choquette 2017 est attribué à MARIE-CLAUDE LAPALME pour Le bleu des rives, recueil paru aux éditions du Septentrion.
Une mention d’honneur est décernée à CHLOÉ SAVOIE-BERNARD pour Des femmes savantes, publié par les éditions Triptyque.

Cette année, les membres du jury ont choisi de récompenser le tout premier recueil de Marie-Claude Lapalme. C’est dire que le Prix Adrienne-Choquette met en lumière une voix nouvelle, prometteuse, remarquée tant pour sa poésie que pour sa rigueur. D’une grande intériorité, les neuf nouvelles du Bleu des rives dépeignent un même paysage : un lac, au milieu d’une forêt, autour duquel défilent des personnages tourmentés. Marie-Claude Lapalme excelle dans la création d’atmosphères poignantes, propices à des incursions dans le fantastique et l’onirisme, ce qui ajoute au trouble et au côté fugitif de ces silhouettes qui défilent et qu’elle saisit comme un peintre pour esquisser des tableaux inquiétants et empreints de sensualité. Constituées de monologues intérieurs, ces nouvelles sans dialogues sont d’une grande force d’évocation. Elles mettent en scène des personnages en quête de soulagement et parfois d’échappatoire aux drames qui les habitent. La ligne de l’auteure est claire, droite, sans concession. Les voix narratives varient pour représenter, sous différents angles et avec un minimum de mots, de passages difficiles dont la noirceur n’est jamais gratuite. Le lecteur est ainsi convié à une véritable expérience littéraire qui fait émerger des vérités profondes et souvent insoupçonnées de la vie intérieure.

Dans Des femmes savantes, Chloé Savoie-Bernard met en scène des solitudes féminines qui se déclinent sous tous les angles. La douleur est présente à chaque nouvelle dans les corps regardés, inquiets, consumés, policés, offerts, dévorés, exaltés et brisés, et dans les cœurs, enfouis ou brandis à bout de bras, à la fois assoiffés d’authenticité, cyniques et ardents. Dans une langue crue, poétique, drôle et percutante, Chloé Savoie-Bernard nous happe, nous entraîne et parfois nous sème pour mieux nous surprendre plus loin. Même les passages qui semblent tranquilles, voire anecdotiques, ne sont pas inoffensifs : ils s’installent en nous, germent lentement pour finalement nous éclore au visage bien plus tard, petites bombes à retardement. C’est dire que ce recueil de quatorze nouvelles, qu’on lit hors d’haleine, n’est pas fait d’une substance éphémère; il reste avec le lecteur longtemps après qu’il pense avoir repris son souffle, colle à la peau de manière parfois inconfortable, mais toujours juste. On ne peut qu’admirer le courage qu’il a fallu pour écrire avec une telle honnêteté, pour plonger aussi franchement dans ces intimités difficiles, violentes et compliquées, et s’émerveiller qu’en s’enfonçant ainsi dans l’infiniment petit, l’auteure soit parvenue à en dire autant sur l’immensément grand.